MACKY SALL RETRACE SON HISTOIRE: Il revient sur les accusations d’anthropophagie portées contre sa personne par Me Wade

Une bibliographie de 168 pages dans laquelle le chef de l’Etat parle lui-même de sa vie, de son parcours, de sa naissance à aujourd’hui. «Le Sénégal au cœur», tel est l’intitulé de l’ouvrage publié par la maison d’édition «Le Cherche midi». «L’As» vous fait découvrir les bonnes feuilles.

SES ORIGINES

«Je suis né le 11 décembre 1961 à Fatick, dans le Sine, au cœur des pays sérère. Mes parents s’y étaient établis après avoir quitté leur terre originelle. Modeste, ma famille était vigoureusement dévouée aux valeurs chères à notre lignée : culte de l’effort, de la droiture, du courage, et de la retenue.(…)Je suis par mon père issu de la lignée des Sall, dont la généalogie est encore jalousement entretenue par la grande famille de griots, nos historiens. (…) Ma mère, quant à elle, est originaire du village de Nguidjilone. Ses ancêtres venaient du village de Néré, situé dans l’actuel territoire de la Mauritanie, au nord de Diffane, dans les terres du Walo du Bosséa. C’étaient des Thimbo, éleveurs traditionnels. (…) Jeune immigré du Nord, mon père, Amadou Abdoul Boubou Sall, quitta sa région d’origine en 1946. (…) mon père s’était essayé à plusieurs petits métiers. Cela fut très dur au début ; mais il était un homme combatif. Puis, en 1948, il trouva un emploi lors de la construction de la Mission catholique de Fatick et de la route Dakar-Kaolack. Enfin, il devint fonctionnaire au ministère de l’Agriculture. Il travailla dans les plantations de Samba Dia entre 1953 et 1955. (…) Ma mère, Coumba Amadou Diawly Hassan Thimbo était également originaire du Fouta. Elle était la cousine de mon père : mariage endogamique. (…) Ma mère était femme au foyer. Epouse et mère de famille, elle s’est adonnée au petit commerce pour contribuer, autant qu’elle le pouvait, à boucler les difficiles fins de mois auxquelles nous exposait la modicité du salaire du chef de famille. Pratique courante dans les milieux modestes, à l’instar de bien d’autres vaillantes dames, elle a vendu des cacahuètes (arachides grillées), un produit encore très prisé de nos jours par beaucoup de Sénégalais. (…) Quand j’ai eu le brevet et qu’il a fallu que je m’installe à Kaolack pour y poursuivre mes études du second cycle, elle a vendu ses bijoux en argent pour financer les études. Elle en vendra bien plus après mon bac. Je me rappelle ces bijoux faits en argent massif, pour les mains et la cheville. J’ai pu comprendre, par la suite, que ces bijoux n’avaient pas seulement une valeur esthétique. (…) J’ai une sœur ainée, Rokia et trois frères Aliou, Mamadou Hady et Abdoul Aziz. Mon prénom, je le dois à mon parrain, Macky Gassama, une figure du Parti socialiste qui fut député et maire de Fatick. Homme bon, juste et généreux, il était le meilleur ami de mon père. »

SES ETUDES

« J’ai effectué mon cycle primaire dans une école publique de garçons. C’est en pleine année scolaire, en 1974, que mon père a été rappelé à Fatick, à la demande de son ami Macky Gassama, mon parrain, chef du secteur agricole, qui lui facilite l’obtention d’un logement et d’un poste de gardien. C’est donc à Fatick que j’ai réussi mon examen d’entrée en sixième et que j’ai débuté mes études secondaires, au collège d’enseignement général (CEG). J’y ai rencontré en classe de troisième un de mes oncles, Abdoul Samba Ndiaye, qui était professeur de mathématiques. Il était très politisé et a commencé à me transmettre des écrits révolutionnaires, notamment sur Lénine. A 15 ans, j’ai ainsi entamé une éducation politique. Après la classe de troisième, j’ai dû quitter la maison de mes parents pour la première fois, pour aller au lycée Gaston-Berger de Kaolack. Un ami de mon père avait une maison à Kaolack : j’ai pu y être hébergé avec d’autres camarades, venus eux aussi de Fatick. Nous avons passé des années d’études loin du foyer familial. Avant la terminale, pour être plus libre, j’ai loué une chambre. J’étais en série C, dominante scientifique, et il fallait travailler dur pour obtenir le baccalauréat. Ce fut chose faite en 1982. Par la suite, j’ai naturellement continué les études à l’université de Dakar. (…) »

MACKY REVIENT SUR LES ACCUSATIONS D’ANTHROPOPHAGIE PORTEES CONTRE SA PERSONNE PAR ABDOULAYE WADE

« Puisque j’en suis à mes origines et à ma famille, je ne peux passer sous silence ; mes lecteurs et mes amis ne le comprendraient pas, un point relatif à des propos nauséabonds qui en surprirent plus d’un. Des propos que l’on n’attendait pas de celui qui les a tenus, quand on sait qu’il a eu la chance, l’honneur, le privilège d’avoir occupé les plus hautes fonctions dans un pays de mesure qui a toujours donné une belle image de lui au reste du monde. La politique politicienne est ce qu’elle est et se prête à tous les coups bas, hélas. Lorsque, en 2015, la justice a traduit Karim Wade devant un tribunal, son père- mon prédécesseur- a perdu toute mesure. Celui qui fut mon mentor, mon guide, cet Abdoulaye Wade qui a tant marqué mon pays, a déclaré : « Macky Sall est descendant d’esclave. (…) Ses parents étaient anthropophages. (…) Ils mangeaient des bébés et on les a chassés du village. (…) Jamais mon fils Karim n’acceptera que Macky Sall soit au-dessus de lui. Dans d’autres situations, je l’aurais vendu en tant qu’esclave ! » (…) L’insulte était donc grave, particulièrement dans le Fouta, la région d’origine de mes parents, où les maccubé (esclaves) restèrent longtemps objets de mépris. Cet héritage de l’époque précoloniale est difficile à comprendre pour un étranger. Hors du Sénégal, sous d’autres cieux, le quotidien français Le Monde Afrique 20 mars 2015 avait suivi cette affaire et mené son enquête pour conclure que Wade avait émis de graves et fausses accusations. Ceux qui connaissent le Fouta et son histoire, ce qui semble ne pas être le cas du Président Wade, savent qui je suis et d’où je viens. Ils savent que ma famille a ses racines dans le Toro et dans le Nguénar, ils savent parfaitement que je suis issu d’une lignée de nobles, célèbres et prestigieux guerriers. (…) Cela est un fait et c’est l’histoire. Cette affaire a bouleversé la communauté du village de Ndouloumadji Founébé, le village d’origine de mon père et de celle de Nguidjilogne, d’où est originaire ma mère. J’ai demandé à mes proches, à ma famille, à tous ceux du Fouta indignés et blessés par ces paroles fausses et d’un autre âge, propos au ras du caniveau, tenus par un homme coutumier du fait, de ne répondre à ces insultes que par le mépris…»

ENGAGEMENT POLITIQUE ET RENCONTRE AVEC WADE

« (…) En fréquentant And-Jef, j’entre politiquement dans la clandestinité… (…) Quand je suis entré à l’université, j’ai donc rejoint officiellement le parti de la gauche maoïste, And Jef MRDN (Mouvement révolutionnaire pour la démocratie nouvelle). (…) En 1983, le mouvement maoïste sénégalais entame un virage vers la radicalisation, je m’éloigne du mouvement maoïste. Le boycott des élections a été le point de rupture. J’ai donc voté pour Me Wade et suis sorti d’And-Jef. Toutefois entre 1983 et 1989, je demeure dans une phase de lutte estudiantine : combattre sans étiquette politique. Cet engagement n’a pas été sans risques. Je ne vais pas jusqu’à affirmer que je fus persécuté, mais des trois Sénégalais de la promotion à l’Institut des sciences de la terre désireux de valider un troisième cycle à l’étranger, je suis le seul à avoir été écarté !(…) Aussitôt sorti de prison, Me Wade part en France, publie un livre, puis rentre à Dakar en février 1989, il organise un gigantesque meeting au cours duquel il lance un appel aux jeunes cadres du pays pour qu’ils le rejoignent et fassent évoluer la situation avec lui. Dès le lendemain, je suis allé le voir et j’ai adhéré à son parti. Pour moi, il est alors le seul opposant crédible, le seul capable de changer les choses, et je veux participer à ce changement»

« ARROGANCE, CERTITUDE D’AVOIR RAISON, AUTORITARISME : LES TRAITS DE CARACTERE D’IDRISSA SECK »

(…) C’est difficile de dire non à un homme de son bord politique, de s’opposer au sein de sa propre majorité. Or, Idrissa Seck est un homme à tendance autoritaire. Il y a des Premiers ministres plus «ronds», plus consensuels ; Idrissa Seck est tranchant, il ne demande pas, il ordonne. Le premier dossier touchant mon domaine dont il se saisit concerne les carrières de Thiès. En 2003, alors que je suis en déplacement à Fatick, ville dont je suis le maire depuis 2002, le Premier ministre convoque une réunion autour de l’avenir des carrières de Thiès. (…) Ce vendredi-là, une réunion est donc organisée sur ce sujet. Mon directeur de Cabinet me représente. La rencontre terminée, il me téléphone immédiatement. «Le Premier ministre nous donne jusqu’à ce soir à 18 heures pour présenter un projet de décret ordonnant la fermeture des carrières de Thiès !». Je suis abasourdi. Thiès est le fief d’Idrissa Seck, mais on ne prend pas une telle décision en un tour de main. Je demande un ordre écrit, je veux avoir un document officiel. Vers 18 heures ; mon collaborateur reçoit le papier et m’informe. Dès lors, les instructions à mon directeur de Cabinet sont claires : ‘’Rangez le document et stoppez la procédure jusqu’à lundi.’’ Je compte mettre à profit cette fin de semaine pour passer à Thiès et voir le Premier ministre qui s’y trouve. Son accueil est très cordial, nous déjeunons ensemble, mais nos points de vue sur la question des carrières sont diamétralement opposés. Je rentre à Dakar et vais passer le reste de ce weekend à bâtir un solide dossier technique sur cette affaire. Je suis fermement opposé à la fermeture des carrières et j’entends bien me battre (…) Le conseil des ministres suivant se révèle assez agité. (… ) Le Président Wade écoute les divers arguments, décide de différer la décision en attendant une étude plus poussée faite par une commission d’experts qui donnera ses recommandations. Je regarde le visage du Premier ministre, il peine à contenir sa colère. (…) Au cours des premiers mois à son poste, Idrissa Seck laisse percer des traits de caractère qui rendent le travail avec lui extrêmement difficile : arrogance, certitude d’avoir raison, autoritarisme… Je crois que, pour gouverner, il ne suffit pas de taper du poing sur la table et de dire d’une voix cassante : « c’est comme ça et c’est tout, j’ai décidé ! » (…) Nous étions trois, les trois fils de Wade, ainsi que la presse nous avait baptisés. Il y avait Idrissa Seck, le fils pressé, Karim Wade, le fils adoré, et puis moi, le fils discret. Karim avait pour lui les liens du sang, ce sont les plus forts. Mais je n’aurais jamais imaginé que son père, que j’admirais tant, aurait pu mépriser à ce point les lois de la République pour tenter d’instaurer une dynastie. »

SON PASSAGE A PETROSEN ET SA RENCONTRE AVEC MAREME

Le directeur général de Petrosen, Ousmane Ndiaye, a reçu un coup de fil des «hautes sphères» lui demandant de me virer et de me faire rentrer de Paris au plus vite. Ousmane Ndiaye a refusé ! Dès mon retour de Paris en 1993, il m’a nommé chef de la Division Banque de données de l’entreprise, l’une des directions les plus stratégiques de l’époque. Ousmane Ndiaye m’avait recruté en personne, il n’est pas du genre à céder aux pressions politiques…. Il est mon ami et j’ai beaucoup de respect pour lui.(…) Au sein de Petrosen, j’ai été sur le terrain pour participer à l’effort de recherche avec les équipes d’exploration. Ma première sortie se situait à Diourbel, c’était en 1991. Je n’y ai trouvé ni gaz, ni pétrole, mais j’y ai découvert une pépite, car c’est là que j’ai rencontré ma future femme ! J’étais parti en mission d’exploration dans cette région où elle vivait avec ses parents. Elle déjà élève en classe de Terminale F3, en électrotechnique. Un de mes amis était son professeur, je suis venu le voir et j’ai connu Marème. »

LES ANNEES FASTES

«J’étais étudiant comme les autres, un jeune homme qui écoutait de la musique le soir. Parfois, il me revient un air de cette époque, la chanson emblématique d’Alpha Blondy, son titre phare, ‘’Brigadier Sabari’’. Cet air, qui me revient souvent me rappelle le lycée, les premières luttes, ma jeunesse… Les années 1980 étaient aussi bouillonnantes de styles musicaux les plus divers, dans l’espace du campus universitaire de Dakar (… ). Et puis ces belles années universitaires ont aussi laissé leur trace. J’ai été membre d’une fratrie inséparable, de celle que le temps n’efface pas. La mienne était drôle, sans malice, sans pacte secret, nul désir de conquérir le pouvoir, pas de ‘’Si j’étais président de la République…’’ Non, juste la ‘’bande à Sandrine’’. Quatre copains du pavillon H du campus universitaire de Dakar, quatre jeunes garçons tombés sous le charme d’une jeune étudiante prénommée Sandrine. Ces quatre étudiants avaient décidé de ne pas briguer les faveurs de la belle, de ne pas entrer en compétition pour elle. Ils ont formé «la bande à Sandrine»

MOI, NIANGAL SALL…

«‘’Le Sévère’’! C’est un surnom que j’ai peut-être mérité. Comme certains ont pu s’en rendre compte, je ne suis pas particulièrement souple. Mais je suis beaucoup moins rigide que mon image pourrait le laisser croire. Etre un homme d’Etat, cela veut dire trancher, prendre des décisions, rendre des arbitrages, donc mécontenter une partie de ceux qui subissent le contrecoup de ces décisions. (…) Si on analyse le bilan de ma présidence, les faits parlent d’eux-mêmes. Je repars au combat pour un nouveau mandat, le dernier. J’ai toujours la même foi en mon pays, le même désir de le faire progresser. Les journées sont longues; je ne me couche jamais avant 2 ou 3 heures du matin, je suis à 9h30 au bureau jusqu’à 15heures. Ensuite, je fais la pause-déjeuner et je me remets à la tâche vers 16 heures. Je reste à mon bureau jusqu’à 23 heures. Je ne me plains évidemment pas : c’est le prix à payer lorsqu’on se donne comme exigence de faire vraiment le job! Le pouvoir change-t-il ceux qui le possèdent ? M’a-t-il changé moi ? Je ne le crois pas.(…) Le pouvoir ne m’a pas changé et ne pourra plus le faire : il est trop tard pour les modifications essentielles. »

L’As

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