LE 15 AOÛT, GUERRE ET PAIX
On est tenté de se demander par quel bout il faut entrer dans l’histoire. Les Tirailleurs Sénégalais qui ont entrepris la libération de la France occupée, tenaient-ils le bon bout ?
Dans une interview accordée au journal Le Monde Afrique, Julien Masson, photographe ayant travaillé sur la deuxième guerre mondiale dit ceci : »C’est une armée d’Afrique qui libère la France par le sud et remonte par la vallée du Rhône, les Alpes et fait jonction dans l’est avec l’armée venue de Normandie. »
Aujourd’hui, le président français Emmanuel Macron rend hommage à ces soldats oubliés à l’occasion du soixante quinzième anniversaire du débarquement de Provence. Il rattrape un petit peu les propos d’un autre président français selon lequel les Africains n’étaient pas suffisamment entrés dans l’histoire. On est tenté de se demander par quel bout il faut entrer dans l’histoire. Les Tirailleurs Sénégalais qui ont entrepris la libération de la France occupée, tenaient-ils le bon bout ?
On est même tenté de renverser l’affirmation et de se demander si les Européens sont bien entrés dans l’histoire quand, à leur profit immédiat, ils en ignorent volontairement des pans entiers.
Sans esprit de polémique aucun, je souhaite qu’en ce jour de célébration de l’ascension au Paradis de la Vierge Marie qui coïncide avec la commémoration du 75 ème anniversaire du débarquement de Provence, nous ayions une pensée pour les embarqués volontaires sans espoir de débarquement. Dans les ports d’Afrique du Nord, de Tanger à Tripoli, ils sont des millions à attendre une embarcation hypothétique dans d’atroces conditions, livrés à l’exploitation des négriers modernes.
L’un d’eux est mon neveu. Pour la Tabaski, il nous a envoyé des voeux. Les yeux tuméfiés, le corps déchiré. Il a eu un accident de zodiac en tentant une énième fois la traversée mais refuse de rentrer, dit-il car il ne veut pas finir comme son père, réduit à tendre la main pour nourrir le reste de la famille.
Probablement a t-il perdu toute rationalité car ici, au moins, il ne subissait pas le traitement dégradant qu’il accepte là-bas.
Mais son cas m’interroge différemment. Quelle transmission offrons-nous aujourd’hui à nos enfants pour qu’un grand nombre d’entre eux préfèrent la mort même à toute autre chose ?
Et si nous en causions?
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