La gestion économique de Macky Sall : entre insouciance et cynisme
Le Président Macky Sall a quitté le pays il y a quelques jours pour des vacances présidentielles dans des pays étrangers loin des terres et des côtes sénégalaises que huit ans de sa gouvernance irresponsable ont mis à sec. Cette attitude de Macky Sall, l’un des rares présidents à passer ses vacances hors de son pays dans des résidences « pieds dans l’eau », témoigne d’une insouciance politique et morale profonde et d’un manque flagrant d’empathie envers les populations. Quel leader quitterait son pays durant une crise pour des vacances ? Pourtant la crise budgétaire est bien là et les signaux d’une crise économique et sociale bien visibles.
Il y a tout d’abord la crise des finances publiques. Nous avions alerté sur cette crise causée par le surendettement du pays sous le régime de Macky Sall (augmentation de la dette publique de 211% en sept ans) ; dette contractée entre autres pour des investissements sans fondement économique et financier réel et viable. Nous avions également dénoncé les engagements pris par le Gouvernement de Macky Sall auprès du FMI pour un ajustement budgétaire dont le coût social serait inacceptable. Les premières mesures gouvernementales d’ajustement budgétaire ont déjà été prises dès le mois de juin avec une hausse des taxes douanières qui ont augmenté de plus de 16,8% par rapport à la même période l’année dernière pour atteindre 362,6 milliards de F CFA, soit un peu plus que la masse salariale de l’Etat (d’après le point mensuel de conjoncture de la Direction de la Planification et des Etudes Economiques DPEE du Ministère des Finances). Ceci aura certainement un impact sur le prix des biens importés et donc le coût de la vie et l’activité économique. Le Président Macky Sall a lui-même annoncé des « potions magiques » qui consisteront à limiter ou couper certaines dépenses budgétaires telles que la fermeture de certains consulats et la réduction du coût des appels téléphoniques de l’Etat.
Cependant, la situation des finances et de la trésorerie publique était toujours au rouge quand le Président Macky Sall quittait le pays pour aller en vacances. En témoigne la recherche effrénée de cash par le Ministre des Finances durant les derniers mois. Comme l’a reporté une partie de la Presse, le Ministre des Finances a décidé de percevoir directement les redevances de l’ARTP auprès des opérateurs téléphoniques et a insisté pour percevoir un paiement anticipé en 2019 sur la base des réalisations de 2018. Dans cette situation les universités privées rechigneront à accepter les étudiants orientés y compris les nouveaux bacheliers, l’Etat n’aura pas l’espace budgétaire pour soutenir les paysans si la tendance pluviométrique se poursuivait et qu’une mauvaise saison agricole se matérialisait, les retards de paiement et dettes aux opérateurs économiques gonfleront. Dès lors la mauvaise performance de notre économie risque de s’aggraver. D’après la DPEE, notre économie était déjà en récession au mois de juin avec une croissance de -2.5% par rapport au mois précédent sur la base de l’Indice General d’Activité (hors agriculture). Notre économie n’a cru que de 3,2% sur une année (juin 2018-juin 2019) soit juste le niveau de la croissance de la population (2.9%), un rythme trop maigre pour enclencher une quelconque émergence.
Le Président Macky Sall, qui a vécu les ajustements structurels des années 80 et les dépassements budgétaires comme Ministre puis Premier Ministre, n’était pas sans savoir les conséquences de sa politique économique désastreuse. Il n’empêche, par calculs électoralistes et armé d’un cynisme politique froid et dur, il a dépensé sans compter, exposant notre pays fragile aux conséquences à venir. C’est ainsi que pendant qu’il voyagera entre l’Orient et l’Occident pour un « repos du corps et de l’esprit », Macky Sall attendra des sénégalais les plus pauvres et les plus fragiles – les paysans, les éleveurs, les travailleurs précaires, les étudiants – qu’ils paient le prix de sa gouvernance insouciante et cynique pour éviter le gouffre.
La République des Valeurs
Cellule Economique
Les commentaires sont fermés.