DANSOKHO, UNE FIGURE QUI A INSPIRÉ LE MEILLEUR DE LA POLITIQUE
L’ancien leader du PIT a vécu une vie pleine d’engagement, au cours de laquelle il n’a jamais transigé sur ses convictions et ne s’est jamais départi de sa liberté de ton et de parole – Toutes choses qui l’ont sans doute protégé des compromissions
Le leader historique du Parti de l’indépendance et du travail (PIT), Amath Dansokho, décédé vendredi à Dakar des suites d’une longue maladie, à l’âge de 82 ans, est une figure légendaire de la gauche sénégalaise dont la carrière politique a été nourrie aux mamelles du patriotisme et du panafricanisme tout à la fois, l’un et l’autre s’intégrant en s’approfondissant à la mesure de ses fortes convictions.
Il est décrit comme l’un des hommes politiques, sinon l’homme politique sénégalais le plus franc et le plus direct du Sénégal.
Le défunt leader historique du PIT fut un « responsable engagé » et un « militant dévoué », a souligné Macky Sall, cité dans un communiqué du service chargé de la communication de la présidence sénégalaise.
Selon le chef de l’Etat, Amath Dansokho « aura été de tous les combats, en se donnant toujours corps et âme, pour la paix et la démocratie ».
« Homme de conviction d’une générosité débordante, Monsieur Amath Dansokho aura marqué notre histoire politique et sociale contemporaine pour son rôle éminent et historique de lien entre plusieurs générations d’acteurs politiques, de grand rassembleur infatigable et médiateur politique et social d’une qualité humaine remarquable », souligne le président de la République.
Le défunt leader du PIT, né à Kédougou (sud-est) en 1937, fut « un homme de conviction et un homme de foi », qui vivait au-dessus des contingences quotidiennes, a souligné le président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, sur la Radio Futurs Médias (RFM, privée). Il dit avoir perdu « un grand-frère ».
Amath Dansoko a vécu une vie pleine d’engagement, au cours de laquelle il n’a jamais transigé sur ses convictions et ne s’est jamais départi de sa liberté de ton et de parole, toutes choses qui l’ont sans doute protégé des compromissions politiques.
Amath Dansokho n’a jamais cessé d’être un militant dans le sens politique le plus noble, abhorrait la langue de bois, se faisait le défenseur de la transparence et de la démocratie, vivait quasiment comme un ascète qui faisait peu de cas des contingences terrestres et se détournait autant des préoccupations matérielles.
Il a été emmené au communisme par la lecture à l’âge de 14 ans du livre de Maurice Thorez, « Le Fils du peuple », un ouvrage qui a contribué à forger son engagement dès le lycée.
En 1957 déjà, il dirigea une grève au lycée Faidherbe de Saint-Louis (nord), avant d’adhérer au Parti africain de l’indépendance (PAI) de Mahjmout Diop, la même année.
Amath Dansokho interrompit ses études d’économie à l’Université de Dakar en 1960 pour échapper à la répression après la dissolution du PAI. Il entama une vie d’exil entre Bamako, Alger, Cuba et Prague.
Il fait des études de journalisme en Tchécoslovaquie avant de revenir au Sénégal en 1977 à la faveur de l’amnistie générale décrétée par Léopold Sédar Senghor, pour fonder en 1981 le PIT, un petit parti animé surtout par des intellectuels de gauche.
Amath Dansokho est « une mémoire du combat politique » en Afrique et au Sénégal, a retenu l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, décrivant le défunt leader du PIT comme « un très grand patriote qui s’est mis toute sa vie au service du Sénégal et de l’Afrique ».
Sa mort devrait inciter à prendre en compte, dans la conduite des affaires publiques, la volonté du défunt d’apporter « du sens et de l’intelligence » aux pratiques des hommes politiques, a souligné le député Moustapha Guirassy, qui lui a succédé à la mairie de Kédougou.
Moustapha Guirassy a témoigné de la proximité de son père Mamba Guirassy, ancien président du Conseil économique et social, avec le défunt dont le père Bakary Dansokho a éduqué le sien.
Mamba Guirassy et Amath Dansokho étaient de camps politiques opposés, mais ils ont gardé les mêmes relations de fraternité, ce qui reste à l’honneur du leader du PIT et de son ouverture d’esprit, selon l’actuel maire de Kédougou.
« Le Sénégal a perdu un grand combattant, un valeureux combattant (…) qui avait de fortes convictions » et représentait « un repère et une référence », a-t-il ajouté.
Selon Moustapha Guirassy, les hommes politiques doivent s’interroger sur leurs pratiques à la lumière des qualités de démocrate et de rassembleur du défunt.
Il avait été détenu avec Abdoulaye Wade, Abdoulaye Bathily et d’autres leaders politiques, lors des troubles politiques de 1988 au Sénégal, nés de la contestation des résultats de l’élection présidentielle de cette année-là.
Cette figure qui restera insoumise pour toujours a été l’architecte de toutes les luttes politiques ayant conduit à l’alternance politique en 2000, d’où sa relation affectueuse avec celui qui a été porté à la tête du Sénégal à cette date, même dans le tumulte politique qui pouvait caractériser leurs relations qui n’étaient pas sans divergences.
Sous le règne de ce dernier, il a continué à assumer un rôle de vigie politique qui l’a de plus en plus éloigné de M. Wade sur le plan politique, sans jamais mettre fin à la profonde affection avec l’ancien président.
Il semblait pouvoir parfois réconcilier par sa posture morale et politique, grande adversité et profonde affection, deux termes définitivement irréconciliables chez les hommes politiques ordinaires.
Le même engagement politique l’a conduit à apporter son soutien à l’actuelle président Macky Sall dont il fut un des conseillers et dont il était resté proche ces dernières années sur le plan politique, en dépit de sa santé fragile.
APS
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