Algérie : le blues des anciens caciques du régime Bouteflika à la prison d’El-Harrach
Bagarres, crises de nerfs, dépressions… Les anciens hauts responsables du régime Bouteflika placés en détention accusent sévèrement le coup. Enquête.
Depuis les hauteurs d’El Biar, le bâtiment de style mauresque domine la capitale. Ici, c’est le siège de la Cour suprême, antichambre de la prison d’El-Harrach. Là où sont prononcées les inculpations. En somme, le purgatoire, avant la descente aux enfers. Les anciens membres du gouvernement et hauts cadres de l’État convoqués, puis auditionnés par un magistrat instructeur redoutent ce lieu où la vie bascule.
L’ancien ministre de l’Industrie, Amara Benyounes, est victime d’un malaise devant le bureau du juge et fait des allers-retours aux sanitaires. Tayeb Louh, ex-garde des Sceaux, supplie le juge qui lui fait face de le placer sous contrôle judiciaire plutôt que sous mandat de dépôt. L’ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal refuse même l’idée d’être auditionné, avant d’être expédié à El-Harrach dans un fourgon cellulaire. Son successeur, Ahmed Ouyahia, avait, lui, pris soin de demander l’autorisation de rendre visite à son cancérologue avant de franchir le grand portail de la Cour suprême, lucide quant au sort que le magistrat allait lui réserver. Lui aussi dort aujourd’hui en prison.
L’incarcération : une plongée dans les abîmes pour certains, un instant de délivrance pour d’autres. Lorsqu’il franchit, le 18 septembre, les portes de la prison d’El-Harrach, Moussa Benhamadi, ancien ministre des Télécommunications, PDG du groupe privé Condor, qui a fait fortune avec ses frères dans l’électroménager, lâche un soupir : « Enfin, je suis là ! » Soulagé ? Si l’on se doute bien que l’idée de prendre place dans une cellule n’enchantait guère, initialement, l’homme d’affaires, son soulagement est à interpréter à l’aune des semaines de stress qui ont précédé son inéluctable détention.
Jeune Afrique
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