DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME DU 29 AOÛT 2024, UN BLANC-SEING À LA DÉFORESTATION

Selon Action pour la justice environnementale (AJE), cette décision est surprenante étant donné les débats intenses et la décision inédite des autorités publiques de suspendre les travaux sur le littoral.

Le 29 août 2024, la Cour Suprême du Sénégal a tranché en rejetant la requête d’AJE-Action pour la Justice Environnementale (AJE), qui demandait l’annulation du décret 2023-813 du 5 avril 2023. Ce décret, qui approuve et rend exécutoire le Plan d’Urbanisme de Détails (PUD) pour la bande Yeumbeul Nord, Malika, Tivaouane Peulh, et déclassant une partie de la bande des filaos, a ainsi été validé par la Cour.

Selon AJE, cette décision est surprenante étant donné les débats intenses et la décision inédite des autorités publiques de suspendre les travaux sur le littoral. La question avait conduit à une instruction approfondie, incluant une visite sur les lieux pour évaluer l’état actuel de la bande des filaos.

Introduite en 2023, la requête d’AJE contestait la régularité du décret, affirmant que l’adoption du PUD n’avait pas été précédée d’une Évaluation Environnementale, comme l’exige l’article L48 du Code de l’Environnement de 2001. Cet article stipule que tout projet susceptible de nuire à l’environnement doit faire l’objet d’une évaluation. AJE avait également soutenu que la décision de déclassement était en contradiction avec les engagements internationaux du Sénégal, notamment les accords de Paris sur le changement climatique et la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.

La Cour Suprême a rejeté ces arguments, arguant que le PUD avait été soumis à une Évaluation Environnementale Stratégique (EES) depuis 2016, approuvée par arrêté en 2018. Cette position est jugée surprenante par AJE, qui affirme que ni l’organisation ni les communautés riveraines n’avaient connaissance de cette EES. De plus, aucun document de ce type n’avait été mentionné par l’Agent Judiciaire de l’État ou les autorités compétentes lors de la procédure. AJE note également que, dans une décision antérieure de 2022 sur la même question, la Cour avait estimé que la régularité d’un décret n’était pas conditionnée par la réalisation d’une EES, bien que cette étude semble avoir existé à l’époque.

La décision est aussi critiquée pour sa lecture des accords internationaux. Selon AJE, la Cour a interprété ces accords comme visant principalement à fournir des fonds aux pays en développement pour atténuer les changements climatiques, renforcer la résilience et lutter contre la désertification, tout en contribuant au développement durable. La Cour a jugé que le décret était conforme aux accords en prévoyant des aménagements d’espaces verts sur les terres déclassées. AJE considère cette approche comme une réduction des obligations environnementales à des mesures compensatoires superficielles.

AJE craint que cette décision ne crée un précédent dangereux pour la conservation des espaces naturels, en permettant des déclassements futurs sous prétexte de mesures compensatoires limitées. Selon l’organisation, cette décision met en évidence un faible niveau de sensibilité écologique dans le jugement des questions environnementales par les autorités judiciaires sénégalaises.

En conclusion, selon AJE, l’arrêt de la Cour Suprême du 29 août 2024 sur la bande des filaos est significatif non seulement pour son impact potentiel sur la déforestation, mais aussi pour ce que l’organisation perçoit comme un manque de rigueur écologique dans le système judiciaire sénégalais.

seneplus

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