Changement climatique : Le village de Salguir perd ses atouts économiques

Situé à une vingtaine de kilomètres de Saint-Louis, le village de Salguir était tristement sorti de l’anonymat après le chavirement en 2016 d’une pirogue ayant causé la mort de neuf personnes. Ce drame avait poussé les autorités à construire un pont pour faciliter la traversée de la population. Cependant, bien que ce danger ait été écarté, une autre menace plane désormais sur ce village fondé en 1932 : le changement climatique.

Salguir, un village ancien, fait partie d’un grand ensemble nommé la « zone des trois marigots », elle-même incluse dans le Delta du fleuve Sénégal, un espace de 46 000 hectares. Cette zone abrite trois parcs nationaux, deux réserves de faune, une réserve communautaire et une aire marine protégée, le tout formant une réserve de biosphère transfrontalière.
 
Outre Salguir, plusieurs autres villages contribuent à faire de cette zone une vitrine exceptionnelle de biodiversité.
Pourtant, malgré cette richesse naturelle, le péril est imminent. La raréfaction des espèces halieutiques, qui faisaient autrefois de la zone un important pourvoyeur de poissons pour la localité de Ross Béthio, l’assèchement continu des marigots, mettant un terme aux activités de maraîchage, et la disparition progressive de la faune et de la flore, privent cette région de ses principaux atouts économiques.
C’est dans ce contexte que l’association African Journalists Forum a organisé une visite afin d’alerter sur ces périls et d’attirer l’attention des gouvernants sur les conséquences tragiques de cette situation.
 
 Selon Dame Diagne, secrétaire général de l’Association des Intervillages, le changement climatique pousse de nombreux jeunes à quitter le village pour chercher du travail ailleurs :
« Par le passé, le village était très prospère. On pouvait aller pêcher tranquillement et revenir avec beaucoup de poissons, mais maintenant, avec le changement climatique et la prolifération du Typha, il est difficile d’en trouver. C’est la même chose pour l’agriculture, dont les rendements ont nettement diminué », a-t-il déploré.
Le professeur de géographie Boubou Aldiouma Sy explique que les problèmes actuels de Salguir doivent être replacés dans le contexte plus large du changement climatique global : « Le changement climatique modifie les paramètres climatiques, tels que la température, l’ensoleillement ou les vents, ce qui perturbe sensiblement les activités productives primaires. Ces changements affectent les paysages végétaux, renforcent l’énergie éolienne et hydrique, et perturbent les sociétés, notamment à travers des phénomènes migratoires.
 
Le Sahara, par exemple, s’est asséché, il y a environ 5 000 ans à cause d’une saison astronomique qui a commencé, il y a 7 000 ans. Nous sommes actuellement à mi-parcours de cette période. Ces transformations ont des effets directs sur des zones comme Salguir, qui subissent une perte de biodiversité et de productivité. »
René Massiga Diouf, président de l’African Journalists Forum, a précisé l’objectif de cette visite :
 
« Nous cherchons à documenter et à montrer les effets des changements climatiques sur cette zone. Salguir était autrefois stratégique, produisant des quantités importantes de produits agricoles et halieutiques pour alimenter les villes environnantes. Aujourd’hui, cette activité tend à disparaître, entraînant des conséquences graves non seulement pour les populations locales, mais aussi pour l’ensemble de la région. » Face à ces défis, il devient urgent que les autorités et les communautés locales s’unissent pour préserver ce patrimoine naturel unique, et, avec lui, l’avenir économique et social de Salguir et de la zone de trois marigots.
seneweb

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