’’IL FAUT RENDRE LE RÉGIME PRÉSIDENTIEL MOINS PESANT’’

 L’historien et archiviste-paléographe sénégalais Saliou Mbaye trouve que des moyens doivent être trouvés pour rendre le régime en vigueur au Sénégal « moins pesant » sur le judiciaire et le législatif.

Selon l’universitaire, les Sénégalais « sont dans leur grande majorité favorables au régime présidentiel », mais il faut se demander si « ce régime présidentiel n’est pas trop fort par la tête ? ».

Aussi le professeur Saliou Mbaye considère-t-il qu’il faudrait voir comment rendre ce régime présidentiel « moins pesant » sur les pouvoirs judiciaire et législatif.
Il rappelle, dans un entretien avec l’APS, que le Sénégal avait « connu un régime présidentiel fort de 1963 à 1970, et ensuite la création de la primature en 1970 a un peu allégé les charges au quotidien du président de la République ».
L’historien et archiviste est revenu sur la trajectoire politique du Sénégal en général, en partant de l’éclatement de la Fédération du Mali dans la nuit du 19 au 20 août 1960, une entité regroupant le Sénégal et l’ancien Soudan Français (actuel Mali).
Selon l’archiviste sénégalais, cette « rupture fondamentale » avait permis la mise en place d’institutions pour la bonne marche du pays.
Le Sénégal, proclamant son indépendance après son retrait de cette Fédération, « prend les mesures nécessaires pour se doter des institutions qui devraient concourir à la bonne marche du pays », a-t-il analysé.
« Tant qu’on était un Etat colonisé, on n’avait pas de président de la République. La première grande innovation était l’élection du président de la République le 5 septembre 1960. Le président Léopold Sédar Senghor a été élu par un collège de 80 députés de l’Assemblée nationale », a-t-il signalé.
Comprenant 7 représentants des assemblées régionales, 33 délégués des communes, ce collège s’était réuni en congrès pour élire Léopold Sédar Senghor président de la République. Ce dernier nomma Mamadou Dia, président du Conseil, le 7 septembre 1960.
A partir de 1960, a-t-il signalé, le Sénégal avait « un régime bicéphale » avec un président de la République et un président du Conseil qui gérait le gouvernement. Cette situation allait durer jusqu’à la crise de 1962 marquée par la destitution de Mamadou Dia.
« C’est par une motion de censure votée par l’Assemblée nationale présidée par Lamine Guèye que le président du Conseil, Mamadou Dia avait perdu le pouvoir. Le président Senghor proposa une nouvelle Constitution le 7 mars 1963 », a ajouté le professeur Mbaye, ancien directeur des Archives nationales du Sénégal (ANS).
Cette Constitution soumise au référendum, avait mis en place « un régime présidentiel » en 1963 et depuis lors, le Sénégal a toujours vécu sous ce régime, a-t-il ajouté.
Parmi les autres innovations, le professeur Mbaye note l’institution du poste de Premier ministre le 26 mars 1970 avec la nomination d’Abdou Diouf.
Il a fait observer que la Primature fêtera son cinquantenaire en 2020, « quand bien même cette institution a connu des ruptures entre 1983 et 1990 ».
D’autres institutions furent ensuite crées comme l’Assemblée nationale avec l’élection de Lamine Guèye en 1960 comme président, note Saliou Mbaye.
« Le Conseil économique et social créé en 1961 par Mamadou Dia, devient effectif en 1963. L’autorité judiciaire est devenu pouvoir judiciaire à partir de 1963 avec la mise en place d’une Cour suprême et des cours et tribunaux », a-t-il expliqué.
Sur la comparaison entre le régime bicéphale et le régime présidentiel, le professeur Saliou Mbaye relève que « les Sénégalais eux-mêmes ont tiré la conclusion », relevant que « le régime bicéphale a abouti à un conflit » entre Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia.
« Aucun pays n’aime les conflits politiques. Et les Sénégalais ont gardé une certaine méfiance du régime bicéphale », a commenté l’historien, archiviste et paléographe.
Aps

Les commentaires sont fermés.