Côte d’Ivoire : Reprise des mutineries de soldats après l’annonce d’un règlement
Des soldats ivoiriens sont descendus dans les rues d’Abidjan, de Bouaké et Korogho en tirant des coups de feu en l’air pour marquer leur mécontentement après l’annonce la veille de la fin des mutineries qui touchent la Côte d’Ivoire depuis le début de l’année.
A Abidjan, des soldats mutins ont pris position devant l’état-major des armées, au camp militaire Galiéni, alors qu’à proximité d’autres militaires loyalistes et des policiers ont installé un périmètre de sécurité, a constaté un journaliste de l’AFP.
Cartouches en bandoulière, bonnets vissés sur la tête ou arborant des bandeaux de camouflage, les soldats mutins tiraient sporadiquement en l’air alors que d’autres petits groupes de soldats bloquaient tous les accès à l’état-major des armées.
Empêchant la population de circuler dans cette zone située dans le quartier du Plateau, leurs tirs faisaient fuir des chauve-souris nichées dans les arbres. Un soldat mutin paradait avec un lance-roquette.
« Passez, passez, ce n’est pas après vous qu’on en a », ordonnait un mutin à des curieux.
« S’ils veulent tirer, ils n’ont qu’à aller tirer à la présidence, c’est là-bas que cela se passe, il ne faut pas effrayer les populations comme ça », lançait un Ivoirien.
On a très peur
Enervé, un professeur des écoles expliquait être « venu ici pour retirer un document » auprès des services administratifs dans le quartier du Plateau. « Et maintenant, je me retrouve dans cette situation. Ce n’est pas bon pour le pays, dit-il, on ne sait pas ce qui va se passer, on a très peur ».
« Ça a commencé à tirer vers 8 heures du matin, des cargos (camions militaires) sont passés, ils ont débarqué des militaires, ils tirent en l’air toutes les 2 ou 3 minutes », a déclaré à l’AFP une fonctionnaire dont les bureaux dominent le camp militaire.
Cachés derrière des murs, des civils observaient la situation, alors que des mutins continuaient de tirer sporadiquement en l’air, pour tenir les curieux à l’écart.
A Korhogo, ville du nord ivoirien, des tirs ont également été entendus pendant la nuit et dans la matinée, selon des témoins contactés par l’AFP.
A Bouaké (centre), deuxième ville du pays et siège du 3e bataillon d’infanterie qui avait été l’origine du mouvement de contestation en janvier, des militaires mécontents ont parcouru vendredi les rues, en tirant en l’air.
D’autres militaires circulaient à bord de camions dans les rues où la plupart des commerces avaient fermé. Le campus universitaire de Bouaké a également été fermé.
La veille, une cérémonie en présence du président Alassane Ouattara et d’un sergent mutin et plusieurs soldats avait acté la fin des contestations.
Cérémonie sans presse
Organisé sans la présence de la presse et diffusé en différé après montage, l’évènement se voulait un point final au mouvement de protestation de l’ensemble des forces de sécurité, alors que le pays est durement touché par l’effondrement des cours du cacao, qui ont vidé les caisses de l’Etat.
Le sous-officier mutin avait été présenté comme « le sergent Fofana », représentant du contingent des 8.400 anciens rebelles intégrés dans l’armée à l’origine du mouvement et dont une grande partie fait partie du 3e bataillon d’infanterie de Bouaké.
Il avait notamment « présenté ses excuses » au nom de ses camarades et annoncé que les mutins avaient décidé de « renoncer à toute revendication d’ordre financier ».
Le président Ouattara avait affirmé « croire à la sincérité de leurs paroles » et s’était dit certain qu’ils seraient désormais des « militaires exemplaires ».
Les mutins avaient réclamé 12 millions de francs CFA de primes (18.000 euros) et obtenu le versement dès janvier de 5 millions (7.500 euros), entrainant des mouvements de revendication similaires dans d’autres catégories de l’administration.
Début janvier, la Côte d’Ivoire avait été secouée par une mutinerie d’anciens rebelles intégrés dans l’armée, qui avaient paralysé plusieurs villes, notamment à Abidjan. Des affrontements avaient fait quatre morts à Yamoussoukro (centre).
Par Patrick FORT – AFP
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