POUR UNE ALTERNATIVE SOUVERAINE
L’indiscipline est partout ; elle est de tous ordres – Peu de travailleurs respectent les heures de bureau – Les fêtes se préparent dix jours à l’avance et se terminent trois jours après – Et on veut, avec ça, faire du Sénégal, un pays émergent ?
La capitale nationale et les grandes villes du pays sont méconnaissables au point qu’on se demande, en parcourant ce beau pays, si nous n’avons pas opté pour une féroce dictature de l’indiscipline et du laisser-aller. Le chef de l’Etat s’en est ému dans son discours à la nation et de nombreux citoyens lui emboîtent le pas ou l’ont même précédé dans la dénonciation d’une ambiance qui, à force de s’étendre et de s’aggraver, risque de déboucher sur le chaos.
Ainsi, un ancien haut fonctionnaire, Mamadou Diop, a décidé de joindre sa voix à cette manifestation d’indignation, en soumettant aux décideurs et à l’opinion publique, un ouvrage fourmillant de réflexions précieuses : « Vision et projet de société – Pour une alternative souveraine ». Avant la cérémonie de lancement de cet ouvrage, nous vous en proposons des extraits. « Nous n’allons pas décrire dans le détail la situation que nous vivons quotidiennement depuis de nombreuses années. Cela touche tous les aspects de notre vie et, (les sociologues pourraient nous le préciser), il ne serait pas étonnant d’y trouver la source du stress qui accentue, chaque jour un peu plus, l’agressivité des gens et l’insécurité ambiante. Le mal vivre engendre le désespoir et ouvre la porte au chaos. Ce que nous offrons au monde, ce sont des rues encombrées, dont aucune portion n’est libre et qui sont transformées en urinoirs publics ; des « cars rapides » qui, véritables cercueils mobiles, devraient cesser de rouler depuis de nombreuses années ; des chauffeurs de taxis clandestins qui, de Guédiawaye, envahissent aujourd’hui le Plateau ; des pousse-pousse qui défient les voitures ; de gros camions qui s’engouffrent dans des rues étroites aux heures de pointe y empêchant toute circulation ; des constructions anarchiques dont certaines, en nous cachant la mer, nous font oublier que Dakar est une ville côtière ; des mendiants par milliers, certains utilisant parfois un haut-parleur pour se faire entendre ; des rues bloquées par des tentes à l’occasion de n’importe quelle cérémonie … Il faut y ajouter les importations sauvages de déchets (véhicules de tous âges, frigos polluants, pièces détachées obsolètes…) ; la vente libre de produits alimentaires et de médicaments sans aucune précaution d’hygiène ; une pollution sonore due aux multiples cérémonies qui ne respectent ni le sommeil ni le repos des autres…
Et j’en passe. On a vu apparaître et laisser prospérer un nouveau type de criminels, coupables d’« écocide » ou massacre d’économie, pour qui tout est bon pour s’enrichir rapidement au détriment de nos entreprises et de notre balance commerciale. L’indiscipline est partout ; elle est de tous ordres. Peu de travailleurs respectent les heures de bureau. Les fêtes se préparent dix jours à l’avance et se terminent trois jours après. Élèves et lycéens s’accordent des congés anticipés et prolongés.
Pour obtenir la satisfaction de la moindre revendication, n’importe quel groupe peut fermer routes et voies d’accès par des barricades ; même nos vaillants bidasses s’y mettent. Et on veut, avec ça, faire du Sénégal, un pays émergent ? Notre société s’enfonce chaque jour un peu plus dans une inconscience collective terrifiante pour l’observateur extérieur. Il n’est que de voir le classement du Sénégal en termes de niveau de développement humain. Nos enfants grandissent dans une ambiance d’anarchie généralisée. C’est cela qui fait peur ».
Cette peur pourrait engendrer une réaction bénéfique au pays si les Sénégalais prenaient collectivement conscience de leurs responsabilités envers l’image que leur patrie devrait donner au reste du monde pour servir de modèle à ses frères africains comme l’ont réussi le Rwanda, l’Ile Maurice et le Cap Vert. Il y faut un leadership fort, porteur d’une vision et d’un projet de société pour fixer le cap et s’y maintenir en dehors de toute considération politicienne.
Sud quotidien
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