OUMAR SARR A-T-IL L’ÉTOFFE POUR DIRIGER LA FRONDE ?

« Si les actions humaines sont gouvernées par l’instinct de survie et la satisfaction des intérêts, elles sont toutefois perturbées par les passions », disait hobbes dans le Léviathan. Aujourd’hui, l’on peut appliquer cet aphorisme à la situation de crise qui prévaut au sein du Pds. Depuis que le président Abdoulaye Wade a remanié le secrétariat national, un vent de rébellion ouverte souffle dans le Pds.

C’est ainsi que des médias ont relayé que, ces derniers jours, des réunions se tiennent régulièrement chez Me Amadou Sall et chez Oumar Sarr. des rencontres auxquelles prennent part, aux côtés des deux responsables précités, d’autres comme Babacar Gaye, le député Abdoul Aziz Diop, le Dr Cheikh Tidiane Seck, patron des cadres libéraux, Alinard Ndiaye, Sara Sall.

Plusieurs autres participants, tous responsables de premier plan dans leurs fédérations respectives, assistent également à ces rencontres. Il est clair que deux camps antagoniques se font désormais face à l’intérieur du plus grand parti de l’opposition. l’un animé par le refondateur en chef Karim Wade, l’autre par Oumar Sarr, chef de file des conservateurs. La bataille fratricide entre Karimistes rénovateurs et légitimistes conservateurs est devenue ouverte et sanglante. Mais au plan médiatique, les partisans de Karim prennent les devants en se transbahutant de média en média pour expliquer le bienfondé de ce remaniement du Secrétariat national, instance exécutive du Pds. Cela dit, il faut se demander si Oumar Sarr, qui a toujours été à la base de l’exclusion des militants hérétiques par le passé, dispose d’assez de ressources politiques, humaines et financières pour diriger le camp des frondeurs légitimistes conservateurs. Ces derniers excluent de quitter le Pds, jurant de mener la résistance au sein même du parti. Mais il est peu probable qu’ils puissent rester longtemps à l’intérieur et mener librement leur combat. Ils risquent d’être taxés de fractionnistes puis exclus sans autre forme de procès. Des têtes sont tombées pour cause d’activités qualifiées de fractionnisme.

Oumar Sarr, qui dirigeait par procuration le parti libéral quarantenaire, n’a pas le charisme et l’autorité pour diriger les frondeurs. En l’absence de Karim Wade, il n’a jamais su se faire respecter par les militants qui savaient qu’il ne faisait que chauffer par intérim la place en attendant le retour au pays du véritable propriétaire. Lors de la vente des cartes de renouvellement du parti, Oumar Sarr et sa délégation en tournée à Mbacké se sont heurtés à une cacophonie sans précédent qui s’est installée dans la salle du théâtre des verdures qui abritait la rencontre des libéraux. C’est ainsi que la députée Sokhna Fatma Diop, privée de parole, s’en était violemment prise à Oumar Sarr et à Madické Niang en les taxant de « ce que Me Wade a de plus médiocre dans sa formation politique. » Elle a aussi déploré que « le PDS nous ait envoyé des responsables soi-disant d’envergure nationale, alors qu’ils ont été tous battus chez eux lors des élections dernières et ce, jusque dans leurs propres bureaux de vote ». Par conséquent, pour la députée libérale de Touba, « Oumar et Madické n’ont de leçons à donner à personne. Et à cause de leur comportement fumiste, ils sont en train de saper les fondements du PDS ».

Pour la députée libérale, « ces deux responsables qui ne valent rien chez eux, sous prétexte de diriger les opérations de ventes des cartes, ne sont que des chasseurs de primes qui engloutissent dans leurs poches l’argent destiné aux militants ». Cela était assez révélateur du caractère lymphatique du coordonnateur du parti. Oumar Sarr n’a jamais su prendre des décisions sans en référer à Doha ou Versailles. Une telle soumission en dit long sur le manque de personnalité du désormais ex-coordonnateur du Pds. Oumar Sarr n’a jamais osé dire tout haut ce qu’il pensait tout bas de la disqualification de Karim Wade à la présidentielle. Il pensait certes qu’en faisant le vide autour de lui, le vieux renard Wade allait l’imposer comme l’ultime plan B. Ce qui n’a pas été le cas. Et c’est la mort dans l’âme qu’il a accepté cet oukase du vieux qui sonnait comme une bombe qui ruinait toutes ses prévisions.

Un tel ectoplasme politique n’est pas du genre à diriger une bataille qui demande stratégie, patience et persévérance. Prendre la tête d’une fronde peut être chose facile mais avoir les moyens politiques et stratégiques de la conduire victorieusement n’est pas chose aisée. Il faut noter qu’il risque d’y avoir une fronde dans la fronde ou des divergences de vues et d’orientations stratégiques parce qu’il est de notoriété publique qu’entre Oumar Sarr et Babacar Gaye, ce n’est pas le grand amour. Leur alliance n’est que conjoncturelle. Il faut rappeler que, lorsque ce dernier se retirait le 5 avril 2018 de la commission nationale chargée de la Vente des cartes et du renouvellement des Structures du Pds, il indexait Oumar Sarr.

Lequel lui avait retiré la parole quand il avait voulu se prononcer sur des questions de stratégies. et c’est ainsi que, quelques jours après la tenue du comité directeur où il avait signifié sa démission de la commission chargée de la vente des cartes au Pds, l’alors porte-parole du Pds s’était expliqué sur les raisons d’une telle décision : « Mon renoncement est dû une divergence de vues profondes sur la manière dont le parti est administré et avec la manière dont ces initiatives ont été prises. Nous n’étions pas en phase avec eux sur la façon d’organiser la tournée et sur la composition des membres de la tournée. C’était pour tirer la sonnette d’alarme que je m’étais décidé de me retirer de ces commissions.» Mais aujourd’hui, pour des raisons opportunes, pour ne pas dire opportunistes, il faut taire les divergences intestines, les laisser se tasser en attendant de combattre les ennemis qui se trouvent être l’héritier illégitime du Pds et le légataire. Oumar, le frondeur en chef des légitimistes conservateurs, parviendra-t-il hardiment à s’opposer aux karimistes rénovateurs ?

Les jours à venir vont apporter la réponse à cette question.

seneplus

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