Les États-Unis commémorent l’arrivée d’Angela, première esclave africaine
Ce week-end, les États-Unis commémorent les 400 ans de l’arrivée d’Angela sur le sol américain. Angela est la première esclave officiellement recensée par les colons britanniques. Arrivée par bateau depuis le Ndongo – l’ancien nom de l’Angola -, en 1619, elle a accosté dans l’État de Virginie, où un mémorial est aujourd’hui construit. Baptisé Fort Monroe, il est ce week-end le théâtre de festivités pour rendre hommage à Angela et aux millions d’autres Africains réduits en esclavage.
Les cérémonies de Fort Monroe ont un but précis : célébrer la contribution des Africains réduits en esclavage à la société américaine. Lectures, concerts, conférences… Le programme du week-end est chargé, avec un point culminant dimanche.
« Dimanche sera ce qu’on appelle le Jour de la guérison, explique Terry E. Brown, surintendant du mémorial de Fort Monroe. Nous allons amener une cloche, et nous la ferons sonner à travers tout le pays à 3 heures de l’après-midi. Nous allons la faire sonner pendant 4 minutes. Chaque minute représentera un siècle. »
Terry E. Brown est lui-même un descendant d’esclaves. Sa famille est originaire du Cameroun. Il explique l’importance de rendre hommage aux premiers esclaves américains.
« Ils ont enduré des conditions de vie parmi les plus oppressives qui soient, dit-il. Mais ils ont été capables de se réinventer. Ils n’ont pas fait que survivre à l’esclavage, ils ont créé cette réponse fraîche et vibrante en construisant des familles, des musiques, des langages, de nouvelles formes d’art. Donc nous allons rendre hommage à leur système de valeurs, à leur persévérance et à leur beauté. Je suis honoré de pouvoir le faire. »
Aux États-Unis, l’esclavage aura officiellement duré 246 ans, depuis l’arrivée des premiers esclaves en 1619 jusqu’à son abolition en 1865.
♦ « J’ai découvert mes liens avec le Cameroun »
Terry E. Brown dirige ce lieu de mémoire depuis 2016. Il est le premier Afro-Américain à occuper ce poste, et a découvert il y a peu, grâce à un test ADN, que sa famille a, elle aussi, subi l’esclavage. Il l’a raconté à RFI.
« J’ai toujours voulu en savoir plus sur mon passé, et quand je suis arrivé à Fort Monroe en 2016, que j’ai appris ce qu’il s’était passé ici, j’ai su qu’il fallait que j’en sache plus sur ma propre histoire. Quand j’ai appris que j’avais des liens avec le Cameroun, ça a rendu tout ça tellement spécial. Je me suis assis, et j’ai pleuré parce que c’était tellement émouvant de connaître le parcours de ma famille. Je pouvais enfin commencer à reconstituer le puzzle. »
« Je ne sais pas énormément de choses sur mes ancêtres pour le moment, sauf qu’ils sont arrivés aux États-Unis par les États de Virginie et de Caroline du Nord. C’est intéressant parce que cela veut dire qu’ils sont certainement passés par le Cap Old Comfort, là où se trouve Fort Monroe. Je n’arrête pas de penser : » Waouh ! Est-ce que mes ancêtres ont pu débarquer ici en 1619 ? » Je n’en ai aucune idée, mais ça n’a pas d’importance. Ma culture a subi l’esclavage, et je m’en rends compte chaque jour à Fort Monroe. »
Les archéologues sur la trace du propriétaire d’Angela
Arrivée par l’État de Virginie, Angela avait été achetée par le capitaine William Pierce, un riche marchand de plantes. Aujourd’hui, une association d’archéologues, la Jamestown Rediscovery Foundation tente de comprendre la vie d’Angela et de son propriétaire en fouillant le site où ils ont vécu.
En presque deux ans de recherches, l’équipe d’archéologues a mis au jour de nombreux objets de la propriété du colon William Pierce.
« Nous avons trouvé 300 objets qui témoignent du système esclavagiste nord-américain,explique David Givens qui dirige les fouilles. Sur le site, nous avons donc 246 ans d’esclavage sous nos yeux, révélés par l’archéologie. Le site est divisé en plusieurs parties. Il y a un premier site, celui d’Angela, mais nous travaillons aussi sur une plantation du XIXe siècle. »
Le site de fouilles se trouve à Jamestown, à une soixantaine de kilomètres du Cap Old Comfort, là où Angela a posé le pied aux États-Unis en 1619. Pour David Givens, ce travail archéologique ne permet pas uniquement de comprendre le passé des États-Unis.
« Ces fouilles montrent aussi ce que nous sommes, en tant que nation, dit-il. Donc je vais probablement passer le reste de ma carrière à tenter de comprendre pas seulement comment deux cultures, celles des colons et des esclaves, ont fabriqué notre nation, mais comment nous sommes devenus Américains. »
Les fouilles du site sont prévues jusqu’à la fin de l’année 2019.
Rfi
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