L’ACCORD SUR LA POLÉMIQUE DU VOILE À L’ISJA EST UNE FARCE
Énoncer un accord pour les 22 élèves voilées est un déni de droit pour tout autre élève qui éprouverait demain le désir de mettre le voile – Si le ministre n’a pu résoudre un problème de ce niveau, c’est qu’il n’est pas à la hauteur des enjeux
Et surtout, 1000 questions que l’autorité n’a pas tranchée sur le modèle que l’on veut pour l’école de la République.
Une occasion encore manquée d’affirmer un peu plus notre identité.
La chronique RFM est signée Abdoulaye Cissé
Que c’est commode de faire semblant d’avoir trouvé une solution à la crise du foulard à l’école Jeanne D’Arc.
On a tellement joué à se faire peur, à entretenir une sorte de tension artificielle dans le pays pour un épiphénomène qu’on arrive à se convaincre que c’est l’accord du siècle, telle une résolution des Nations-unies pour sceller la paix entre Israël et Palestine.
On peut vraiment s’estimer heureux ici de n’avoir pas certains problèmes d’autres pays, au point de s’en créer des mini-minis problèmes.
Si c’est pour s’exercer à la résolution de crise, genre faire une simulation sur des cas pratiques avant que ne survienne la vraie grosse crise qui va déchirer notre société, on peut comprendre.
Mais finalement à voir la façon laborieuse dont cette affaire est gérée avec à la clé, une résolution qui ne satisfait personne, on peut craindre quand surviendra la bourrasque sociétale.
Il n’y a tellement rien dans cet accord que la minute établie par le cabinet ministérielle met en avant dans son communiqué, les 8h de négociations nocturnes pour une entente à minima et à l’arraché paraphé à 1H 30 du matin. La dramaturgie ministérielle cru bon d’ailleurs de nous apprendre que les négociations ont eu lieu à Diamniadio, un coin perdu du pays. Apprécier l’esprit de sacrifice des protagonistes qui sont allés à Canossa pour sauver le pays. Tout va bien, la cohésion nationale est préservée. Grand merci, seigneur !
On aurait d’ailleurs pu ajouter, pince sans rire que le ministre n’a pas dormi à la suite puisqu’il lui fallait présenter son accord de cessez-le feu le matin en Conseil des ministres. Non, soyons sérieux.
Qui peut croire que cette crise, c’était juste une affaire de taille de foulard. Je me demande qui dans cette réunion tenait la calculatrice tel un épicier pour déterminer le nombre de yard au delà duquel le foulard serait voué aux gémonies et finir sur le bucher, telle l’héroïne Jeanne D’arc.
Cet accord est une farce et le ministre de l’éducation nationale qui s’en gargarise ne rend vraiment pas service à la République.
Déjà, énoncé qu’un accord est trouvé pour les 22 élèves voilés est un déni de droit pour tout autre élève qui éprouverait demain le désir ou le besoin de mettre le voile. On lui dira que son cas n’est pas prévu par l’accord. Ça alors !
Et moi qui suis Hindou, de confession sikh, que fait-on de mon fils dont le foulard dépasse le plus haut des bonnets ?
Que fait-on demain avec le fils du coopérant Touareg ou diplomate du Niger dont le fils veut mettre la kaala traditionnelle des gens du désert ?
Que fait-on surtout de l’enfant du fonctionnaire de l’Etat d’Israël qui veut accueillir le shabbat du samedi comme il se doit et mettre sa kippa le vendredi : faudrait peut-être lui donner le diamètre réglementaire de son bonnet.
Un accord, on le fait avec les acteurs d’un conflit. Dès lors, il n’est pas étonnant que les familles réservent leur décision pour n’avoir pas pris part à ce conclave nocturne qui a ignoré tout de leur préoccupation.
Dans cette affaire, soit l’Institution Sainte Jeanne D’arc est dans son droit d’interdire les signes distinctifs religieux dans son espace, alors on le conforte n’en déplaisent aux familles et à l’opinion en général.
Ou alors, l’école Jeanne D’arc a tout faux d’importer un modèle de laïcité qui n’est pas le notre et pas conforme à notre « vivre ensemble », on remet l’institution privée catholique à sa place par une décision d’autorité.
Couper le foulard en deux, pardon couper la poire en deux est la plus mauvaise des solutions à cette affaire.
Celui qui en parle le mieux, est un conseiller technique du président de la République en charge de ces questions. Et pour lui, cette affaire est du niveau de l’inspection d’académie et ne devait même pas remonter au ministre.
J’ajouterais, si le ministre n’a pu résoudre un problème de ce niveau, c’est qu’il n’est vraiment pas à la hauteur des enjeux. Faudrait peut-être qu’on commence à écouter les conseillers. En plus ils sont payés pour ça !
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