Les confessions du chanteur Pape Diouf
Nouveau style, nouvel univers, nouvel album, nouveau label… C’est avec entrain que Pape Diouf a amorcé un nouveau tournant dans sa carrière. Avec «Far West Africa», il matérialise ainsi son premier projet, après son départ de Prince Arts. Il nous en parle dans cet entretien, entre autres confessions…
Vous venez de lancer sur le marché international votre nouvel album « Far West Africa». Qu’est- ce qui a motivé le choix du titre et quel sens lui donnez-vous ?
Ce titre «Far-West Africa» est choisi pour imager la place de l’Afrique dans le monde. Sorte de jungle où plusieurs cultures se retrouvent, l’Afrique doit se montrer conquérante et résistante. «Far-West Africa» est donc un cercle d’images qui nous rappellent les anciens films de Western, mais également, la position géographique de mon pays qui se trouve à l’extrémité Ouest du continent africain. Il s’agit ainsi de montrer une autre position que nous occupons dans le monde. Une manière pour moi de dire aux jeunes qui constituent l’avenir, de se lever et de s’unir, pour exploiter toutes nos ressources et potentialités. Ainsi, nous pourrons faire développer notre chère Afrique.
On vous découvre sous un nouveau style à l’opposé du Pape Diouf « Mbalakhman ». Pour arriver à ce résultat, la transition a-t-elle été facile ?
Le nouveau style que j’ai adopté dans cet opus, est un travail de longue haleine. La musique est universelle et il ne faut pas se fixer de limites. Plus on s’ouvre, mieux on arrive à toucher d’autres peuples. J’ai commencé par faire du «Mbalakh», c’est mon identité et c’est grâce à ce registre que je me suis fait connaître. Je pense n’avoir plus rien à prouver à ce niveau. Le défi pour moi, est d’explorer d’autres champs de la musique, sortir de ma zone de confort. Ce qu’il faut aussi savoir, c’est que le «Mbalakh» est beaucoup plus difficile à déchiffrer mais, il faut quand-même dire que la transition n’était pas évidente.
Quelle place le « Mbalakh » qui vous a propulsé au-devant de la scène va-t-il occuper dorénavant dans votre carrière ?
Comme je le disais tantôt, le «Mbalakh» est mon genre de prédilection. J’ai grandi avec ça et je suis devenu le Pape Diouf que tout le monde connaît grâce à cela. Donc, c’est évident que je ne vais pas du jour au lendemain, l’exclure de ma carrière. Il y reste et va continuer à occuper une grande part. A travers le «Mbalakh», je revendique non seulement ma «Sénégalité» mais aussi, ma culture.
Dans cet opus, vous avez beaucoup collaboré avec des artistes de renom de la trempe d’Ina Modja, Fally Ipupa, Jacob Desvarieux. Comment le «link» s’est-il opéré entre vous ?
Toutes ces collaborations ont pu se faire par le biais de Tokotsho, un ami, un producteur avec qui j’avais dans un premier temps, démarré ce projet d’album international, à travers son label «K-Prod». C’est lui qui avait facilité le link entre ces artistes de renom et moi. Je les remercie tous, autant qu’ils sont, pour la confiance. En plus des titres, «Tu m’as oublié», «Paris-Dakar», «Tente ta chance» et «Irremplaçable», j’ai fait «Elle est à moi» en featuring avec Fally Ipupa, «Far-West Africa» avec Inna Modja, «La dernière fois» avec Awa Imani, «Engeulé» avec S-pri noir, «Il n’y a que l’eau» avec Jacob Desvarieux, «Minguis Cii iyo» avec Moums, «Dis Wallah» avec Soralé et «Ça vient de l’Afrique» avec Gilles Guillot. Quelqu’un comme Jacob Desvarieux, cela a été un réel plaisir de travailler avec lui. Enfant, lorsqu’il venait avec son groupe, «Kassav», donner des concerts ici, je faisais tout pour me procurer un billet et aller les regarder. Lorsqu’on lui a proposé la collaboration avec moi, il n’a pas hésité non plus, car comme il l’a dit, il a une histoire avec le Sénégal. Fally Ipupa, ainsi qu’Inna Modja et Awa Imani sont des artistes que je respecte énormément, ils ont répondu avec un grand cœur à mon appel. Tout comme S-pri noir, qui est en train de faire son trou dans le Rap français. Mouns est quant à lui, de la nouvelle génération qui fait de l’Afro-Trap en France et il cartonne. C’est un Soninké d’origine et il avait été marqué par mon album «Partira». Depuis, il suit ce que je fais. Aujourd’hui, c’est moi qui suis devenu son idole. Il fait de belles choses qui me touchent. «Soralé» aussi qui est de la famille de feu Doudou Ndiaye Coumba Rose qui a porté haut le flambeau de la culture sénégalaise. C’est une fierté pour moi de travailler avec ce groupe.
Pape Diouf a amorcé un nouveau tournant dans sa carrière, en créant sa propre société de production, « PDG ». Il est sans doute prématuré de dresser un bilan mais, depuis sa mise en place, il y a un an, quels avantages et inconvénients en avez-vous tirés ?
Effectivement, il est encore beaucoup trop tôt pour tirer un bilan. Tout début est difficile, mais il suffit juste d’y croire et de ne surtout pas baisser les bras. Aujourd’hui, en mettant en place ma propre société «PDG» (Pape Diouf Groupe), je me positionne comme un architecte qui est encore en chantier. J’en suis au tout début de la fondation, même si le projet et les plans sont clairs dans ma tête. Il me faut y aller, étape par étape. Du coup, on ne peut pas encore voir à l’œil nu, les résultats. Avec l’apparition de la Covid-19, nous avons pris un peu de plomb dans l’aile, mais toujours est-il que nous avons pu expérimenter de nouvelles choses. Dans un sens, il y avait même du bien dans cette période de stand-by pour la musique.
«L’enjeu, ce n’est ni Prince Arts, ni mon label PDG, mais…»
Si vous deviez faire le parallèle avec votre ancienne maison de production, « Prince Arts », qu’est-ce que cela serait ?
Je salue au passage mes anciens mentors du label «Prince Arts» qui m’ont accompagné dans ma carrière et propulsé jusqu’à ce que je décide de prendre mon destin en main. Avec eux, j’ai accompli un travail incontestable et réalisé des projets démentiels. Il est d’ailleurs bon de préciser que nous nous sommes quittés à l’amiable, sans aucune animosité. C’est certes un nouveau tournant pour moi, mais je dirai aussi que c’est une continuité car le plus dur est derrière moi. L’enjeu, ce n’est ni «Prince Arts» ni «PDG» mais, c’est plutôt le rayonnement de la musique africaine. Le plus important, c’est d’y travailler et d’y contribuer. Mon idéologie a toujours été de travailler avec déontologie et éthique. C’est ce que je faisais avec mes anciens producteurs et je reconduis le même schéma.
«Porter le flambeau ou relever le niveau de la musique sénégalaise»
Vous comptabilisez plusieurs années dans le show-biz, avec une riche discographie, des voyages, des prestations sur des scènes à travers le monde, des distinctions. Que vous reste-t-il à accomplir dans la musique ?
Je rends grâce à Dieu pour toutes ces choses que j’ai pu réaliser et avoir grâce à ma musique. Au jour d’aujourd’hui, mon plus grand souhait, c’est d’être un digne ambassadeur du Sénégal dans le monde. Je veux le représenter avec les honneurs partout, comme l’ont fait mes aînés qui ont balisé la route. Par-dessus tout, je voudrais porter le flambeau encore plus haut que ce qui a été fait jusque-là, relever le niveau. C’est cela qui me reste à accomplir et j’y travaille sans relâche.
Votre parcours, on le sait, n’a pas été facile. La concurrence étant rude dans le milieu. Pensez-vous que cela soit nécessaire ?
Dans toute chose, il y a du bon et tout ce qui ne vous tue pas, vous rend plus fort. La concurrence permet de se surpasser et de donner le meilleur de soi-même. En revanche, ce qui est déplorable, c’est la concurrence malsaine où les coups les plus bas sont permis.
igfm