Affaire Lamine Diack : Ses soutiens font de nouvelles révélations

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A la lumière des révélations du site français d’informations Blast selon lesquelles Lamine Diack aurait perçu des « commissions occultes » de plus de 4 millions de dollars américains, dans le cadre de l’attribution en 2014 des championnats du monde d’athlétisme au Qatar, nos confrères de Emedia ont donné la parole au collectif de soutien de l’ancien président de l’IAAF devenu World Athletics.

Pour rappel, sportifs, politiques, et amis avaient effectué le déplacement, le mardi 19 septembre 2017, pour le lancement du collectif de soutien. « Nous voulons que la justice française, dans un souci d’humanité, puisse permettre à Lamine Diack de regagner son pays », expliquait le porte-parole du jour et non moins journaliste, Majib Sène.

Autre acteur de ce collectif de solidarité pour Lamine Diack, qui est soupçonné en France de corruption, Mamadou Koumé, qui rappelait que l’ex-numéro un de l’athlétisme mondial a des soutiens partout. « Il s’agira, pour le collectif, de recueillir un maximum de signatures à travers le Sénégal, à travers l’Afrique, à travers le monde. Et ensuite nous remettrons cette pétition aux autorités de notre pays », détaillait-il.

« Cette farce n’a fait que trop duré », selon Abdoulaye Thiam, le président de l’ANPS

Les deux confrères cités n’ont pas souhaité réagir. En face, le président de l’ANPS, Abdoulaye Thiam reste droit dans ses bottes. « Je ne sais pas ce que vous appelez révélations, c’est un papier qui a été sorti par un site qui s’appelle Blast dont moi j’ignore l’existence, ma position d’hier ne varie pas, martèle le journalisme, au bout du fil. »

Évoquant une « farce qui n’a fait que trop duré », il soutient que « jusqu’à l’extinction du soleil, il refusera qu’on (lui) fasse croire que Lamine Diack est mêlé dans une histoire d’extorsion de fonds contre les athlètes. » Il en veut pour preuve : « Quelqu’un qui a été incapable de payer 500 000 euros pour bénéficier d’une liberté provisoire, comment aujourd’hui, on peut se lever un bon matin, pour me dire qu’il a reçu des fonds qataris de plus de 2,5 milliards F CFA. On me le sort comme d’un seul coup. »

Poursuivant, il assène : « Et nous, on est là, en tant qu’Africains, nous ne voulons faire aucune investigation. Nous ne sommes allés ni au Qatar, ni à Rio de Janeiro, nous ne sommes allés ni en France, ni en Angleterre. On consomme tout ce que les médias occidentaux nous donnent. Je refuse, moi, d’être dans cette posture-là. J’ai été avec lui pendant des années, je refuse de croire à ce que les gens veulent que je crois. Je refuse. Tant qu’il n’a pas été condamné définitivement, je refuse de croire à ce qui est écrit par les sites français et les sites anglais. »

« Je prends parti »

Abdoulaye Thiam assume pleinement le fait de prendre position dans cette affaire : « Je prends parti parce que la prise de position est une fonction du journaliste. Je l’ai dit et je le répète, jusqu’à l’extinction du soleil, personne ne peut me faire changer d’avis là-dessus. Jacques Vendroux a pris position dans l’affaire Michel Platini. Il l’a lavé à grande eau. La France a pris position. L’ancien Premier ministre Manuel Valls a dit qu’on ne brûle pas un champion. Je suis désolé, il n’a payé aucun pot cassé. Parce qu’il n’a jamais été arrêté, il n’a jamais été inculpé ou mis en prison. On ne lui a jamais interdit de sortir du territoire français. Il va où il veut. Or, Lamine Diack a été retenu dans une prison à ciel ouvert, pendant trois ans, son passeport a été confisqué. Ça, ce sont les faits. Ce que je dis, je le répète encore une fois, je refuse qu’on me fasse croire que Lamine Diack est dans un scandale d’extorsion de fonds contre des athlètes. Je refuse de le croire. Parce que je l’ai vu à l’œuvre. J’ai vu comment il a fait pour qu’aujourd’hui les athlètes puissent vivre de leur art. Ce n’est pas ce monsieur-là qui a servi l’athlétisme africain pendant plus de trente ans, qui a servi l’athlétisme mondial, qui puisse se retourner contre les athlètes et être soudoyé. Non, je refuse de croire à ça. »

Ibrahima Bakhoum insiste sur le droit du public à l’information

Toutefois, le journaliste-formateur Ibrahima Bakhoum met un bémol : « Est-ce que le journalisme peut prendre position sur cette question-là ? Je me dis que le journaliste peut prendre position sur toute question mais à condition d’abord de donner les faits. Parce qu’en déontologie, même si les faits vont à l’encontre de vos intérêts à vous, ce n’est pas vous qui comptez, c’est le droit du public à l’information qui compte. A ce moment-là, vous devez dire au public, voici ce qui s’est passé. N’en déplaise, même si cela me gêne, c’est le droit du public de savoir ce qui s’est passé. Maintenant, une fois qu’on a fini de donner les faits, on peut entrer dans des explications, des commentaires. Mais ne commençons pas par chercher à dire tout de suite, c’est faux. Et quand vous faites cette affirmation, vous commencez à activer le racisme. »

Certes, « le journaliste, c’est une personne qui respire, qui réfléchit, qui a de la sensibilité, qui a une âme, qui a des convictions, qui a parfois des certitudes, on ne peut pas lui reprocher d’avoir un point de vue, une opinion sur un fait », relève-t-il. Mais, s’empresse-t-il d’ajouter : « il n’a pas le droit de pervertir des faits. Il n’a pas le droit au nom de ses intérêts à lui, de dire que de toute façon ça, c’est faux. »

Ensuite, Ibrahima Bakhoum pointe le risque d’une certaine connivence : « Ce qu’il ne faut pas oublier que nous le voulions ou pas, ce que je dis là, je l’assume totalement, l’IAAF a parfois aidé des journalistes organisés en réseau ou en individus, peu importe, pour la couverture de certaines compétitions internationales. Quels journaux, quelles radios, quelles télévisions, qui avaient les moyens parfois de faire de longs séjours, de placer des envoyés spéciaux, sur des compétitions internationales avec tout ce que cela comporte comme frais, etc. Donc, il y a forcément un soutien. »

« Lamine Diack avait parfois besoin de communicants »

Puis, embraie-t-il : « il y a aussi le fait que Lamine Diack avait besoin parfois de communication. La communication, c’est l’art de faire croire et de faire accepter une chose, de créer des convictions même si cela ne repose parfois sur rien. Ça, c’est le communicant qui le fait. Le journaliste n’a pas ces considérations. Le journalisme c’est une question d’honnêteté intellectuelle, d’honnêteté professionnelle, de dire voici les faits. Ces confrères qui prennent position en ont le droit mais assurons-nous d’abord avant de prendre position, est-ce qu’ils sont allés au bout, est-ce qu’en même temps, ils vous disent voici ce que l’enquête a dit… Une fois qu’on a donné les faits de manière honnête, une fois qu’on a fini de faire cela, à côté on peut dire, oui mais… C’est dans ce oui mais, que le journaliste peut convoquer une situation analogue, une sorte d’indignation sélective, disant aux Européens : ’’quand cela se passe chez vous, vous faites cause commune pour être derrière quelqu’un pour le protéger mais parce qu’il s’agit d’un Lamine Diack…Nous aussi nous travaillons sur la base de ce que nous avons et nous l’aidons. »

Ibrahima Bakhoum pointe, toutefois, la méthodologie journalistique dans le traitement du dossier du dossier Diack : « Ce n’est pas parce que des journalistes anglais, français, américains et britanniques ont fait du mauvais travail que je dis, moi aussi, je vais faire du mauvais travail. Ces gens-là ont appris le journalisme en même temps que nous, avec les mêmes curricula, dans les mêmes écoles, parfois avec les mêmes enseignants, ils ne sont pas au-dessus de nous au plan purement professionnel. De ce point de vue, il n’y a pas de complexe à avoir. Maintenant, c’est notre public à nous de savoir également jusqu’où il est réceptif, de faire la différence entre l’information et l’intoxication ».

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