Nigeria : les lanceurs d’alerte désormais protégés par une loi

La loi sur la protection des lanceurs d’alerte au Nigeria, a été votée ce mercredi 19 juillet 2017, par le Sénat, a annoncé une source officielle. Le recours aux lanceurs d’alerte est au cœur du combat contre la corruption lancé par le président Muhammadu Buhari  depuis son arrivée au pouvoir.
 » Cette loi va aider à démasquer la corruption sous toute ses formes ainsi que les pratiques anormales des citoyens, fonctionnaires et entreprises publiques comme privées », a estimé dans un communiqué, David Umaru, le président de la Commission des Affaires juridiques et des Droits de l’Homme du Sénat.

Evoquée pour la première fois en décembre 2016, alors que  la bataille pour le recouvrement des biens mal acquis  battait son plein, cette loi est enfin devenue une réalité après une troisième lecture.

Selon le sénateur Umaru, les informations issues des lanceurs d’alerte constitueront le point de départ d’investigations sérieuses, en accord avec les lois en vigueur.

Cette loi va non seulement assurer la protection des lanceurs, mais prévoit une contrepartie financière pour ces derniers. Au début une récompense de 5%  destiné au lanceur d’alerte avait été annoncée. Cependant, dans son communiqué relayé par la presse locale, le Sénat ne précise pas les modalités de cette contrepartie financière.

« Un tournant a été franchi avec ce vote, vous venez de fournir assistance, encouragement et protection à des patriotes qui risquent leur vie pour enrayer la gangrène de la corruption  », s’est félicité le président du Sénat Bukola Saraki.

Dès son accession au pouvoir le général à la retraite, Muhammadu Buhari, a déclaré une « guerre totale » contre la corruption dans son pays, grand exportateur de pétrole et considéré comme le plus riche du continent, mais confronté à d’énormes difficultés.

Cette politique soutenue par les Etats-Unis et l’Union européenne a permis le recouvrement de plusieurs milliards de dollars de fonds publics spoliés, selon le gouvernement fédéral.

Plusieurs membres de l’ex-gouvernement du président Goodluck Jonathan sont dans le viseur des enquêteurs de la Commission contre les crimes économiques et financiers (EFCC), chargée de la lutte contre la corruption.

Des biens saisis par la justice américaine

Au cours de ce mois de juillet 2017, la justice américaine a annoncé la saisie de biens chiffrés à plusieurs millions de dollars appartenant à des membres du régime sortant de Goodluck Jonathan.

Parmi les saisies figurent, selon Financial Afrik qui relaie l’information, un « yacht » d’une valeur de 80 millions de dollars et un immeuble de 50 millions de dollars situé aux abords de central Park à New York.

« Les Etats-Unis ne sont pas un sanctuaire pour les fruits de la corruption. Les dirigeants d’entreprises et responsables étrangers corrompus ne doivent pas se leurrer… », a déclaré le procureur adjoint, Kenneth Blanco, dans des propos relayés par le site web du magazine économique Financial Afrik.

Selon les estimations du gouvernement fédéral, l’argent de la corruption est estimé à 150 milliards de dollars dont une dizaine déjà récupérés. En avril 2017, l’EFCC avait multiplié les saisies d’importantes sommes lors de perquisitions chez des anonymes mais aussi chez des officiels, comme l’ex-directeur de la NNPC, la compagnie nationale pétrolière, Andrew Yakubu. Des prises rendues possible par des informations émanant de lanceurs d’alerte, selon l’EFCC.

« Le lanceur d’alerte est une personne qui, dans le contexte de sa relation de travail, signale un fait illégal, illicite et dangereux, touchant à l’intérêt général, aux personnes ou aux instances ayant le pouvoir d’y mettre fin », selon la définition qu’en donne l’ONG Transparency international.

Le recours aux lanceurs d’alerte  est de plus en plus admis en matière de lutte contre la corruption. Depuis l’apparition du concept à la fin des années 90 en France, une soixantaine de pays se sont dotée d’une loi protégeant les lanceurs d’alerte.

 

Ouestaf

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